Au Togo, le spectacle est désormais bien rodé. Chaque fois qu’un cacique de la dictature entre en disgrâce avec son clan, une partie de la pseudo-opposition se précipite pour le «récupérer», comme s’il s’agissait d’un trophée de guerre ou d’un renfort décisif. Cette attitude, en plus d’être politiquement naïve, est une insulte à la mémoire des victimes de ce système criminel.
Soyons clairs. Ces individus qui ont servi, protégé et profité de la machine dictatoriale ne sont pas des héros égarés. Ce sont des maillons de la chaîne de répression. Ils ont participé activement ou passivement au pillage, aux violences et aux humiliations infligées au peuple togolais. Les «récupérer» sous prétexte d’affaiblir le régime, c’est blanchir des criminels et piéger l’opposition dans une stratégie perdante.
Il faut le dire sans détour. Lorsqu’un clan de la mafia politique s’oppose à un autre, ce n’est pas une lutte pour la liberté, c’est une guerre de poste, de privilège, de butin. Les Togolais n’ont rien à faire dans ces règlements de comptes entre prédateurs. L’unique position responsable, c’est de laisser ces criminels régler leurs affaires entre eux, tout en protégeant la population pour qu’il n’y ait aucune victime collatérale.
L’opposition véritable ne pactise pas avec les bourreaux. Une opposition digne de ce nom ne récupère pas les bourreaux, elle les isole. Elle exige justice pour les crimes commis, dénonce les responsables au lieu de leur offrir une réhabilitation politique, bâtit une force autonome, enracinée dans le peuple et refuse les alliances contre nature avec les tortionnaires d’hier.
Tant que cette rupture radicale n’aura pas lieu, le système Gnassingbé aura toujours une porte dérobée pour survivre. Le peuple n’est plus dupe. Les Togolais ont compris depuis longtemps que cette pseudo-opposition ne se bat pas pour la libération, mais pour une place à la mangeoire. Ce jeu de dupes doit cesser.
La libération du Togo ne viendra ni d’anciens bourreaux recyclés ni de politiciens à double face, mais de la mobilisation populaire et d’une opposition intransigeante, débarrassée des compromis honteux. Quand la mafia s’entredéchire, le peuple doit rester à distance. Quand l’opposition tend la main aux bourreaux, le peuple doit lui tourner le dos.
La vraie lutte du peuple ne peut pas pactiser avec l’ennemi.
Eric Georges Anani Lawson
Salut Eric,
Ton article est très pertinent. Beaucoup de partis dits d’opposition au Togo n’ont jamais eu pour projet de renverser le système, mais simplement de s’y intégrer. Leur but est souvent d’élargir leurs marges de négociation, d’obtenir des postes, des privilèges ou une visibilité politique.
Dans cette logique, récupérer un «transfuge» du régime est perçu comme une valeur ajoutée tactique, pas comme une trahison morale pour ces pseudo-opposants.